Ce 24 mai 2018, l’ACOSS (organisme collecteur des cotisations de Sécurité sociale) a organisé une conférence de presse,consacrée aux résultats 2017 de la « lutte contre le travail dissimulé ».

Finalement, tout tient en un chiffre : 541 millions d’euros de redressement ont été opérés pour le travail dissimulé (ce qui représente le tiers des redressements effectués par les URSSAF).

Autre information donnée par l’ACOSS : les redressements ont été multipliés par 9 en un peu plus de 10 ans …

Ces chiffres sont présentés comme preuve de l’efficacité des URSSAF dans leur lutte contre le travail dissimulé, «  pour protéger les travailleurs et éviter la concurrence déloyale ».

Le think tank Le Cercle Lafay, derrière ces chiffres,  pose la question : la fraude aurait-elle explosé ainsi en une petite décennie ? Ou, autre hypothèse, la notion même de « travail dissimulé » n’est-elle pas devenue tellement « attrape-tout » qu’elle permet à tout inspecteur de procéder presque systématiquement à un redressement après un contrôle ?

Si, bien évidemment, il convient de redresser les entreprises qui recourent au travail dissimulé, le site de notre think tank  (www.lecerclelafay.fr) recense les cas – malheureusement très fréquents – où l’URSSAF qualifie de « travail dissimulé » ce qui  semble relever des relations de bon voisinage, d’amitié, ou d’entraide familiale.

Un laissé-pour-compte en réinsertion qui reçoit un modeste pécule ? Travail dissimulé.

Un frère ou un voisin qui donne un coup de main ? Travail dissimulé.

La femme qui aide son mari à servir au bar ? Travail dissimulé.

Un client qui ramène sa tasse au comptoir ? Travail dissimulé.

Un bénévole dans une association culturelle ?  Travail dissimulé.

Un dirigeant qui, sans souffrir de phobie administrative, se trompe dans une formalité ?  Travail dissimulé.

 

Cette notion de travail dissimulé ne veut aujourd’hui plus rien dire.

A force de l’appliquer à tout-va, les inspecteurs URSSAF lui retirent, de fait, toute visibilité.

 

Si, pour eux, c’est un moyen aisé de procéder à un redressement, cela ne permet sûrement pas de créer des relations de confiance entre eux et les dirigeants d’entreprises qualifiés illico presto de fraudeurs.

 

Les experts du Cercle Lafay plaident pour une différenciation des profils.

 

Si la lutte contre le travail « au noir » (c’est-à-dire les personnes non déclarées) est pleinement justifiée, en revanche, il conviendrait de ne pas s’acharner contre Mamie Bistrot, contre les compagnons d’Emmaüs …

Le fait est que les URSSAF engrangent de « bons » résultats essentiellement dans cette deuxième catégorie. C’est inacceptable.

 

Et il est à prévoir que ce « tir aux pigeons » va continuer puisque le président de l’ACOSS (issu du MEDEF) et l’Etat ont signé une convention d’objectifs pour faire 50 % de plus dans quatre ans.

 

Cette culture du chiffre devrait être remplacée par un travail de fond sur des sujets essentiels pour améliorer les rapports entre l’URSSAF et les entreprises : pallier l’absence de dialogue URSSAF/cotisant, l’absence de sécurité juridique des entreprises, le manque de garanties des employeurs.

 

Malheureusement, cela n’entre semble-t-il pas dans les objectifs des URSSAF et de l’ACOSS.

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